Dans un monde normal, dans un monde ideal, un diplome de thoelogie et philosophie continue a etudier la theologie, et ou l’enseigne a l’universite a de nouveaux etudiants en soif de savoir.
Aux Etats-Unis, un diplome de theologie portoricain immigre depuis 20 ans, parce qu’on lui reprochera toujours sa couleur de peau, son petit accent latino, se verra proposer un poste de bus boy – verser des verres d’eau aux clients dans un restaurant et debarasser les tables – ou bien de manutentionnaire dans n’importe quelle entreprise.
Ou bien deratiseur.
Voila. Ce matin, le deratiseur qui est venu a mon bureau etait diplome de theologie et philosophie, et a parler avec lui un moment, en connaissait certainement plus que moi sur l’Histoire en general et la folie de l’homme en particulier. Il posait ses pieges en souriant et on echangeait sur le droit de vote des femmes. Il rangeait son materiel et on evoquait les esclaves ethiopiens.
Petit, rabée, les yeux petillants derriere des lunettes trop usees, le petit homme au nom de famille francais (Lazard) parlait avec nostalgie de son papa qui avait construit les plus jolies maison de San Juan et lui avait laisse etudier la theologie, puis avait regrette son depart vers les Etats-Unis.
On se dit toujours qu’on n’y restera que quelques annees, le temps d’amasser un petit pecule, disait il en essuyant ses vieilles lunettes. Et puis un jour, on se reveille, on a les cheveux blancs, et on a meme pas un bas de laine rempli de dollars, alors on reste. On ne veut pas mourir ici, a New York, on veut retourner la bas, chez nous, sur l’ile, mais on reste pour l’argent, envers et contre tout.
Il dit qu’un chanteur portoricain decrit si bien ce sentiment : il quitte San Juan en laissant derriere lui son amour et une maison, et un matin, ses jambes ne peuvent plus porter son corps malade, et il se rend compte alors qu’il ne quittera jamais la ville dans laquelle il etait arrive en se promettant d’en repartir riche.
Dans ce monde, voila comment le reve americain se dechire dans la tete des immigres.
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