Que retiendra t-on de New York dans quelques temps ? Se souviendra t-on des visages qui en ont forgé l'’histoire ? Qui traversa le temps sans une égratignure ?
Demandez autour de vous, à vos proches, vos amis, vos collègues, de vous citer quelques noms ou professions qu’'ils associent à New York. En face de vous, on ne va pas se gratter très longtemps le cuir chevelu pour vous répondre le trio de tête : Rockefeller, les traders, les artistes de Broadway.
Rockefeller, magnat du XIXème siècle, qu’on vint à surnommer le Roi du Pétrole. Oui, celui là même qui fonda en 1870 la Standard Oil Company. Oui, me direz-vous, il soutint d’'ailleurs un nombre incalculable d’'organisations philanthropiques. D’'ailleurs, il a une très belle place qui porte son nom dans la ville, et une patinoire très prisée, l’'hiver. L'’illumination du sapin sur la place sus-citée est un évènement que tout New Yorkais a déjà subi au moins une fois, le temps d'’avoir les doigts des mains qui congèlent, entre la sortie du bureau et l'’allumage de l'’arbre en question.
Deuxièmement, les traders. Mais bien sûr. Cette kyrielle de jeunes individus aux dents si longues qu'’ils finissent par rayer le parquet, qui partent en Porsche à Miami pour se faire un whisky et une blondasse. Il y a deux semaines à peine, j’'ai eu un cours de finance dispensé par un ancien trader. Cela faisait peine à voir. 28 ans en salle des marchés avaient fini par avoir raison de ses canines proéminentes, mais il gardait un sourire des plus carnassiers, on n’'osait pas s'’approcher trop près pour lui demander une explication, de peur que dans une pulsion traderesque, il ne nous morde violement. La loi du plus fort. Sans conteste. 28 ans en salle des marchés, de Londres à Tokyo en passant par New York, et tout ça pour terminer enseignant dans une sombre école de commerce, à expliquer la différence entre une action et une obligation à des étudiants qui, marketeurs dans l’'âme, s’'en moquent comme de leur dernière cuite (qui remonte à la veille).
Les artistes de Broadway, me rétorquerez-vous. Oui ! Evidemment. Certes. Je ne vous contredirai pas dans l’'idée, parce que j’'y ai pensé aussi, mais finalement j’'ai envie quand même de contredire aujourd'’hui alors je vais le faire tout de même. Souvenez-vous des débuts de Times Square. Du lieu de débauche que c'’était. Du marketing sous jacent. Mais oui, pourtant ces gens là sont des artistes et je les respecte. Je les admire. De Chicago à Dracula, j’'ai vibré au son de leurs voix, moi aussi.
Et pourtant. Pourtant vous venez de me décevoir. Pourquoi ? Parce que vous pensez lumière. Vous regardez le sommet des buildings mais vous vous boucherez le nez et vous fermerez les yeux dès que vous serez sorti du carré marketing de Times Square.
Parce que vous ne direz jamais d’'emblée : le coursier. Ou le livreur du traiteur chinois, zigzaguant entre les taxis fous, pédalant comme un forcené sur son vélo cabossé, la bandoulière de son Messenger Bag lui barrant la poitrine. Pédalant contre la montre, pour livrer sa pizza en moins de trente minutes, pédalant contre l’'implacable sanction, la peur au ventre de se faire virer si la sacro-sainte masse de pâte arrive froide à son destinataire.
Vous ne penserez jamais d'’emblée à tous ces visages anonymes qui ont construit les kilomètres de galeries du métro new-yorkais, certains travaillant même dans des caissons pressurisés, à des températures tellement élevées qu’'ils tournaient par tranche… d’'une 1/2 heure. Vous ne penserez jamais à ces ouvriers morts dans les galeries que vous empruntez pourtant tous les jours, en pestant contre la terre entière parce que votre sacro-saint train a une minute de retard.
Vous ne répondrez jamais les vendeurs ambulants, qui savent vendre des parapluies comme les gants, faisant évoluer la consistance de son linéaire mouvant au gré des saisons, au fil des jours. Je crois qu'’un matin, j’'en ai vu un vendre des casquettes et des lunettes de soleil, au coin de la rue où je travaillais. Le soir, lorsque je suis enfin sortie, il pleuvait. Et le gars, tout sourire, avait une cargaison intacte… de parapluies.
Le héros de cette mégalopole grouillante est ainsi : il sait vendre des parapluies les jours de déluge, et les troque contre des lunettes de soleil et des éventails dans la touffeur de l’'été new-yorkais.
Demandez autour de vous, à vos proches, vos amis, vos collègues, de vous citer quelques noms ou professions qu’'ils associent à New York. En face de vous, on ne va pas se gratter très longtemps le cuir chevelu pour vous répondre le trio de tête : Rockefeller, les traders, les artistes de Broadway.
Rockefeller, magnat du XIXème siècle, qu’on vint à surnommer le Roi du Pétrole. Oui, celui là même qui fonda en 1870 la Standard Oil Company. Oui, me direz-vous, il soutint d’'ailleurs un nombre incalculable d’'organisations philanthropiques. D’'ailleurs, il a une très belle place qui porte son nom dans la ville, et une patinoire très prisée, l’'hiver. L'’illumination du sapin sur la place sus-citée est un évènement que tout New Yorkais a déjà subi au moins une fois, le temps d'’avoir les doigts des mains qui congèlent, entre la sortie du bureau et l'’allumage de l'’arbre en question.
Deuxièmement, les traders. Mais bien sûr. Cette kyrielle de jeunes individus aux dents si longues qu'’ils finissent par rayer le parquet, qui partent en Porsche à Miami pour se faire un whisky et une blondasse. Il y a deux semaines à peine, j’'ai eu un cours de finance dispensé par un ancien trader. Cela faisait peine à voir. 28 ans en salle des marchés avaient fini par avoir raison de ses canines proéminentes, mais il gardait un sourire des plus carnassiers, on n’'osait pas s'’approcher trop près pour lui demander une explication, de peur que dans une pulsion traderesque, il ne nous morde violement. La loi du plus fort. Sans conteste. 28 ans en salle des marchés, de Londres à Tokyo en passant par New York, et tout ça pour terminer enseignant dans une sombre école de commerce, à expliquer la différence entre une action et une obligation à des étudiants qui, marketeurs dans l’'âme, s’'en moquent comme de leur dernière cuite (qui remonte à la veille).
Les artistes de Broadway, me rétorquerez-vous. Oui ! Evidemment. Certes. Je ne vous contredirai pas dans l’'idée, parce que j’'y ai pensé aussi, mais finalement j’'ai envie quand même de contredire aujourd'’hui alors je vais le faire tout de même. Souvenez-vous des débuts de Times Square. Du lieu de débauche que c'’était. Du marketing sous jacent. Mais oui, pourtant ces gens là sont des artistes et je les respecte. Je les admire. De Chicago à Dracula, j’'ai vibré au son de leurs voix, moi aussi.
Et pourtant. Pourtant vous venez de me décevoir. Pourquoi ? Parce que vous pensez lumière. Vous regardez le sommet des buildings mais vous vous boucherez le nez et vous fermerez les yeux dès que vous serez sorti du carré marketing de Times Square.
Parce que vous ne direz jamais d’'emblée : le coursier. Ou le livreur du traiteur chinois, zigzaguant entre les taxis fous, pédalant comme un forcené sur son vélo cabossé, la bandoulière de son Messenger Bag lui barrant la poitrine. Pédalant contre la montre, pour livrer sa pizza en moins de trente minutes, pédalant contre l’'implacable sanction, la peur au ventre de se faire virer si la sacro-sainte masse de pâte arrive froide à son destinataire.
Vous ne penserez jamais d'’emblée à tous ces visages anonymes qui ont construit les kilomètres de galeries du métro new-yorkais, certains travaillant même dans des caissons pressurisés, à des températures tellement élevées qu’'ils tournaient par tranche… d’'une 1/2 heure. Vous ne penserez jamais à ces ouvriers morts dans les galeries que vous empruntez pourtant tous les jours, en pestant contre la terre entière parce que votre sacro-saint train a une minute de retard.
Vous ne répondrez jamais les vendeurs ambulants, qui savent vendre des parapluies comme les gants, faisant évoluer la consistance de son linéaire mouvant au gré des saisons, au fil des jours. Je crois qu'’un matin, j’'en ai vu un vendre des casquettes et des lunettes de soleil, au coin de la rue où je travaillais. Le soir, lorsque je suis enfin sortie, il pleuvait. Et le gars, tout sourire, avait une cargaison intacte… de parapluies.
Le héros de cette mégalopole grouillante est ainsi : il sait vendre des parapluies les jours de déluge, et les troque contre des lunettes de soleil et des éventails dans la touffeur de l’'été new-yorkais.
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