02 août 2004

La plage à New York

Pas de Lundis de Dolce Vita la semaine dernière et vous m'en voyez fort navrée, mais parfois les méchants vilains patrons tombent sur les pauvres petites stagiaires en les faisant crouler sous le travail et ils aiment ca (les patrons, par les pauvres petites stagiaires comme moi). Ceci étant dit, je me ferais bien une plage ce week-end…

Ahhh l'été...Le soleil, le sable, la mer, les enfants qui courrent sur votre serviette et font de vous la plus belle croquette de sable de la création…

Contrairement à bien des villes tentaculaires, New York possède le grand avantage d'être à distance raisonnable de bancs de sable fin. Le franchouille enfermé trop longtemps dans son donjon bancaire - quelque part entre le 12ème et le 42ème étage d'un immeuble sur la 6ème avenue - a le teint blafard de l'endive en hiver. Le voilà donc qui se réjouit à l'idée de quitter sa prison de verre et de respirer l'air iodé pour quelques heures. Il s'imagine déjà LA plage à l'américaine, vieilles réminiscences de feuilletons télévisés où une blonde pourvue d'un maillot de bain rouge étriqué scrutait l'océan pour aller sauver de la noyade de belles âmes qui n'attendaient que ca. Et si jamais la Gentille Sauveteuse n'était pas à la hauteur de ses attentes, il pourrait alors toujours se lover sur sa serviette, se laisser caresser par la brise et régresser en toute sérénité au QI de la crevette en s'écoutant grésiller.

Parlons raisonnablement maintenant. Si vous décidez d'aller à la plage à Long Island un dimanche, vous allez vite vous rendre compte que votre capacité à donner envie aux autres de vous suivre dépasse votre entendement. C'est comme si tout Manhattan comptait s'y donner rendez-vous. Il est donc très déconseillé de tenter quelque incursion que ce soit en voiture depuis Manhattan (ou plus loin) vers Long Island. C'est tout simplement du suicide. On est serein la première demi-heure, puis, progressivement, l'adrénalise s'installant, on se met à bouillir au milieu des embouteillages. On émerge passablement énervé, on passe quelques heures à la plage en regardant sa montre et en imaginant le bonheur du retour dans de conditions similaires. Qu'on se le tienne pour dit, on sous estime toujours l'ampleur des dégâts. Le retour est souvent, en fin de journée, bien pire que l'aller.

On opte donc pour le train. Moins éprouvant pour notre santé mentale. On embarque à Penn Station, via la Long Island Rail Road - à condition de décider d'aller à la plage à Long Island, biensur. Dans le cas contraire, on peut toujours prendre le métro pour aller à Coney Island ou bien tester - dans un grand instant de folie - la grève du New Jersey.
On se perd un peu dans Penn Station, attention on ne peut payer qu'en cash aux guichets, il faut sinon aller se battre avec les distributeurs automatiques. Moi, je dis ca juste au cas ou vous décideriez d'aller faire la queue, de vous en rendre compte en arrivant au comptoir, réalisant alors que vous n'avez pas de cash et que le train que vous vouliez prendre vient juste de partir - le prochain étant dans une heure, cela va sans dire.
Note hautement utile : on peut aussi embarquer sa planche de surf dans le train. C'est encombrant, tous les autres passagers manquent de s'y casser les dents, mais c'est admis. Si jamais l'envie vous prenait d'aller taquiner la vague en faisant un pied de nez au Gentils Sauveteurs. Cela dit, je pense que dans ce cas, il vous serait totalement inutile d'acheter un aller-retour en train. Le fait de grimacer gaiement aux Gentils Sauveteurs vous permettrait sans nul doute d'accéder au poste de police le plus proche, ne passez pas par la case départ, ne touchez pas 20 000 francs. La dure loi de l'Ouest.
Après avoir eu l'idée folle de tenter l'approche de la plage en voiture, je me suis donc rabbatue sur le train. Le train est comme le métro aux USA. Ne partez pas en short et tongues avec uniquement votre insouciance sur le dos, elle congèlerait. La petite laine de Mamie, par exemple, est une idée judicieuse. On prend le temps de congeler plus ou moins, donc, en la petite heure que met ce train de banlieue a atteindre l'idyllique plage tant attendue. Si par mégarde vous vous étiez endormi - le froid aidant, les neurones fonctionnent au ralenti - vous ne louperez pas l'arrêt plage. Vous serez réveillé au doux clong de la planche de surf de votre voisin dans votre tête qui dépassait un tout petit peu trop. Hagard, on descend alors, pour se retrouver emporté par une mini-marée humaine qui se rue vers l'océan. L'arrivée sur la grève a des allures de débarquement. Tous ces gens munis de tables, chaises, parasols, radios, enfants… tout ce petit monde qui se précipite, pantelant, ruisselant, vers le sable a quelque chose de pathétiquement grotesque. Surtout qu'une fois installé, le but est de surtout, surtout, ne plus bouger - halte là aux multiples marques de maillots de bain.

On a fini, nous aussi, sur le sable. Brulant. Brulant mais on aime ca, car cela nous rappelle combien c'est agréable de s'extraire de la forêt de buildings de New York et de sentir l'Océan. On inspire. On sent l'Océan, certes, mais teinté de crèmes solaires mutilples et variées, de nourritures plus ou moins saines (quoique la tendance nationale tende au gras odorant). Si vous aviez oublié votre pique-nique, vous êtes au Pays de Cocagne. Une plage américaine ne se concoit pas sans infrastructures fast-foodesques. On est loin de la baraque à frites ou la paillotte à Francis, mais l'odeur avoisinante est similaire. Finalement on n'est plus sur d'avoir si faim.

On se décide donc pour faire 'local' et s'installer sur le sable. Dormir, oui, nous tente fort. Si par ailleurs on pouvait bronzer par la même occasion, alors quelle aubaine ! N'oubiez pas, chers lecteurs, que New York est à la latitude de Naples, ce qui implique de se crème-solariser si on ne veut pas virer d'emblée couleur écrevisse et demain peler comme un lézard. Il s'agit stratégiquement de dorer toutes les faces, quitte à s'octroyer un temps de trempage plus ou moins long (à discrétion) dans la grande bleue. Sans s'éloigner trop des Gentils Sauveteurs. En effet, le GS à l'instar du GO est l'amabilité incarnée tant que vous barbotez dans son champ de vision. Qui est très réduit. Au cas où, plusieurs plages ont mis en place un système de bouées encadrant un espace d'eau qu'il est strictement interdit de franchir latéralement - sous peine de se faire réprimander à coup de sifflet rageur. Au delà de ces lignes de baignade, le GS sort les crocs. Mais ne viendra pas vous sauver en cas de souci. Vous n'aviez qu'à nager dans le périmètre assigné.

Vous pourrez ensuite à loisir vous allonger sur votre serviette, et vous laisser sécher au son polyphonique de toutes les radios de vos voisins - c'est un fait, personne ne s'accorde à écouter la même chose, par contre tout le monde veut l'écouter plus fort que ses voisins. Avant de consacrer la réputation râleuse des francais, attendez un peu que l'un des momes de la tribu installée à portée de crème solaire de votre paréo vous recouvre de sable, en courant (et hurlant) pour aller jouer un peu plus loin. Cela vous donnera alors l'opportunité de
1. huler vous aussi
2. rendre à leur propriétaire les deux mètres cubes de sable - la tribu sus-citée (et bientot en voie d'extinction)
3. mettre tout de suite à exécution le processus d'extermination de la tribu sus-citee qui vous entoure en jetant tout ce beau monde dans l'eau
4. en profiter pour les jeter hors du périmètre de sécurité
5. voir accourir tous les Gentils Sauveteurs de la plage, juste pour vous - non ils n'iront pas sauver les récalcitrants qui, malgré les mises en garde ont décidé d'aller baigner leur radio, mome… en decà des bouées
6. d'expliquer aux Gentils Sauveteurs que pour le maintien de la sérénité de cette plage, c'était une action nécessaire, dure, mais nécessaire
7. de voir arriver une chouette voiture de NYPD rien que pour vous
8. d'eviter de payer le fare retour du train
9. de ne pas être coincé dans les embouteillages
10. de vous passer l'envie d'aller à la plage le week-end prochain et de vous porter volontaire pour des heures sup le weekend… Histoire d'être un peu tranquille finalement, et tant pis si vous gagnez le concours de blanchitude de teint… C’est très joli, une endive, non ?

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